Monstres contemporains / ANAphrodite

Publié le par Olivier

Je vous présente une sculpture faite la semaine dernière à l'occasion d'une présentation en bonne et due forme de mes recherches perso devant un collège de coordinateurs, profs et autres 30 camarades réunis pour prendre connaissance du travail des uns et des autres.

J'ai passé une journée et demie (nuit incluse -_-) à sa conceptualisation / réalisation.

En avant propos, je vous soumets cette citation de Patrick Javault :
"Si la violence est, comme le dit la sagesse populaire, banalisée par les médias, ce n'est pas par un excès d'images, mais au contraire par un excès de documents visuels et par un manque d'images véritables."
Cette phrase ouvrait la préface d'un livre portant sur les installations d'Alain Séchas, dont Professeur Suicide, une oeuvre à la portée intéressante, qui m'a pas mal débloqué sur le côté théorique de mes recherches.

Le point de départ de celles-ci est un des cours que je suis cette année ( Concevoir et exposer la peinture, animé par Nina Childress), grâce auquel il nous est donné la chance d'exposer au Musée des Beaux Arts de Nancy. En ce moment même et jusqu'au 15 Janvier se tient une exposition formidable, Beautés Monstres, qui dresse un portrait de nos représentations des monstres depuis la renaissance à nos jours. On y retrouve des gravures religieuses avec des sujets très classiques, comme Saint George chassant le dragon ( non, non, pas d'héroïne là dedans, du moins, ce n'est pas clairement énoncé dans le Bouquin), aux mannequins de Hans Belmer, et autres caricatures, hybrides, peintures de Gustave Moreau, enfin bref, une belle claque, dont on doit se ré-approprier le thème et préparer une suite, qui se tiendra dans l'espace temporaire, au rez-de-chaussée les 3 premières semaines de mars.

Donc, m'interrogeant sur les "monstres" de notre quotidien, qu'il soit une représentation physique, une interprétation morale, je suis tombé presque par hasard sur l'anorexie. J'ai toujours attaché une certaine importance à la forme du corps dans mes travaux (notamment dans mes séries de photographies et autoportraits en fin d'année dernière, Forced Bodies, que je ne montrerai pas ici, pour tout un tas de raisons).

La première pierre est posée, je vais donc bosser sur les hybridations humaines, des corps sur le seuil, entre la représentation incontestable du corps que l'on connaît, et autre chose. Alain Séchas, pour en revenir à lui, aime beaucoup jouer sur les angoisses du spectateur, en le plongeant dans son oeuvre par l'expérience. Il interpelle le visiteur en appelant ses souvenirs d'enfance, ses craintes, en le confrontant (par exemple dans Professeur Suicide), à la mort chez les jeunes, le spectacle du suicide, sereinement enseigné dans une ambiance tamisée, détendue, comme s'il s'agissait d'une chose normale, alors que la mort, mais plus particulièrement le suicide ( et à plus forte raison le suicide chez les jeunes) est un tabou avéré.
Certaines psycho-pathologies liées à la jeunesse, comme l'anorexie, souffrent de cet effet de secret qui, au lieu de faire disparaître le mal, se contente de le cacher à ceux qui préfèrent l'ignorer.

Je n'irais pas beaucoup plus loin dans le descriptif de mes recherches qui ne sont pour l'instant pas beaucoup plus avancées. Mes artistes de référence s'il faut en nommer en particulier, sont Alain Séchas ( vous l'aurez compris :) ), Ron Mueck, Jenny Saville, Hans Belmer, Bernin, ... Je vais simplement expliquer un peu la sculpture qui suit, même si elle ne devrait pas en avoir besoin.

C'est donc une réappropriation d'une figure majeure de la sculpture hellénistique, la Vénus de Milo, déesse de la beauté et de l'amour, mais présentant une évidente difformité. Elle est décharnée, souffrant d'anorexie -une "ana". Elle est prise  sur le seuil. On ne sait pas trop si elle est vivante, morte, jeune, vieille, heureuse, triste. L'ambiguïté réside aussi dans ce qu'elle représente. N'est-elle pas une vision véritable de ce que les médias présentent aujourd'hui comme un standard de beauté ? On la croirait tirée d'un magazine de mode qui se diffuse largement, imposant par la répétition de nouveaux canons, une nouvelle image façonnée de la normalité à laquelle il serait de bon ton de se soumettre.

Je laisse donc cette statue(tte) à votre seul jugement.

http://i1008.photobucket.com/albums/af206/chaotic_landscape/Venusana2.jpghttp://i1008.photobucket.com/albums/af206/chaotic_landscape/Venusana3.jpg?t=1261596282http://i1008.photobucket.com/albums/af206/chaotic_landscape/Venusana1.jpg?t=1261596281http://i1008.photobucket.com/albums/af206/chaotic_landscape/Venusana5.jpg?t=1261596559http://i1008.photobucket.com/albums/af206/chaotic_landscape/Venusana4.jpg?t=1261596558
Petites informations pratiques tout de même, elle est en chavant nsp, elle est au 1:4° ( environ 43/45cm), et le tissu de sa robe/toge n'est pas fini, bien qu'il conservera cet aspect un peu brut, ébauché.

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